Le donneur d'ordre d'un crédit documentaire peut, par le biais de la saisie conservatoire, en présence d'une fraude sur la mise en place ou l'exécution de ce crédit documentaire, faire obstacle à l'exécution par la banque de ses engagements.
Cour de cassation Chambre Commerciale - arrêt du 16 décembre 2008 - pourvoi numéro 07/18729.
Une société donne ordre à sa banque de consentir plusieurs crédits documentaires au profit d'un fournisseur.
Le fournisseur met en jeu le crédit documentaire. La banque de ce fait doit payer le montant du crédit. Les conditions permettant de s'opposer à la mise en jeu du mécanisme de garantie sont très restrictivement admises. L'engagement de la banque est en effet irrévocable.
Le donneur d'ordre utilise alors un mécanisme ingénieux, à savoir, la saisie conservatoire des sommes qui doivent être payées par sa banque au bénéficiaire du crédit documentaire.
Cette méthode est ici validée par la cour de cassation qui infirme les juges d'appel (cour d'appel de versailles 31 mai 2007).
La Cour de cassation dans un attendu de principe énonce :
« qu'en raison de l'autonomie du crédit documentaire par rapport au contrat de base, le donneur d'ordre ne peut en paralyser la réalisation, lorsqu'il est stipulé irrévocable, qu'en établissant une fraude portant sur la mise en place ou l'exécution de ce crédit documentaire ; que, dans ce cas, il peut faire obstacle à l'exécution par la banque de ses engagements en recourant à une saisie conservatoire, sous réserve de justifier d'une créance sur le bénéficiaire du crédit documentaire, paraissant fondée en son principe et des circonstances susceptibles d'en menacer le recouvrement. »
Si la société qui a octroyé un crédit documentaire peut justifier d'une créance elle peut effectuer une saisie conservatoire.
Ce mécanisme constitue un procédé utile en case de fraude du bénéficiaire au crédit documentaire.
Cette solution sera en revanche restrictivement admise par la jurisprudence afin de ne pas totalement anéantir le caractère protecteur du crédit documentaire pour le bénéficiaire. Une remise en cause trop forte du crédit documentaire diminuerait alors la confiance des acteurs internationaux à l'égard des sociétés françaises et de la place financière française en général. Un blocage trop aisé de la mise en jeu du crédit documentaire pourrait porter préjudice aux entreprises françaises effcetuant des opérations de commerce international.
En cas de fraude, le procédé pourra être cependant jugé efficace.
TEXTES VISES PAR CETTE DECISION
- Article 1134 du code civil
- Article 3 des règles et usances uniformes de la chambre de commerce internationale relatives aux crédits documentaires (RUU 500)
Par Olivier VIBERT
Avocat au Barreau de Paris,
19 Avenue Rapp 75007 PARIS
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Fax : (+33) 1 47 53 76 14
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